dimanche 8 décembre 2024

Saint Éloi, des pistes pour rebondir

Suite à la publication du 18 novembre sur le bilan de l'année agricole, Joël Morlet propose quelques pistes de réflexion pour rebondir au delà de l'événement festif de la Saint-Éloi.

Dépasser le trouble actuel du monde agricole

Cette fête de Saint Eloi trouve le monde agricole dans le trouble. Le métier d’agriculteur reste ce beau métier qui met en contact avec la nature et sa force de vie ; force de vie que l’on peut admirer chaque jour et à laquelle le travail agricole fait porter du fruit. Mais tout cela se trouve obscurci par diverses incertitudes, incohérences et questions qui peuvent être écologiques (climat, maladies, …), économiques (concurrences brutales), sociales (isolement, faire face à la diversité des attentes de la société), politiques (règles de la PAC et administration française) au point que l’avenir apparait incertain ; beaucoup d’agriculteurs se trouvent déstabilisés sans vision pour l’avenir. De ce fait la fierté et la dignité de cette profession s’en trouvent affectées.

Contribuer au bien-être et au progrès de la société

Il est tout à fait légitime de désirer trouver une utilité et une fierté dans l’exercice de son métier. Précisément la Parole de Dieu nous invite à garder l’espérance et à continuer à œuvrer pour que le métier d’agriculteur contribue au bien-être et au progrès de notre société. Les bouleversements actuels sont importants et il n’y aura pas de retour en arrière à l’identique ; il s’agit maintenant de tracer des chemins pour renouveler le rapport à la nature et créer une harmonie entre les hommes et avec cette Création que Dieu nous a confiée. Il y va de notre responsabilité même si le chemin apparait difficile.

Dans cet engagement pour tracer des chemins d’avenir, une finalité doit rester essentielle, c’est celle de contribuer au Bien commun, au bien de tous.  Les exploitations agricoles sont aujourd’hui très diversifiées mais cela ne supprime pas la nécessité de l’échange, de la concertation, de la collaboration pour déterminer les chemins les plus bénéfiques pour une agriculture au service de l’humanité. Avant de se penser concurrents ou opposés du fait des choix que nous avons faits et qui creusent toujours plus d’individualisme, il s’agit de se penser solidaires et complémentaires. Des problèmes ne trouveront de solutions qu’en y travaillant ensemble et en mettant nos idées et nos efforts en commun. C’est à la mise en valeur de la même nature que nous sommes appelés.

Le Bien commun doit inclure l’ensemble des catégories sociales du pays

Plus largement la recherche du Bien commun doit inclure l’ensemble des catégories sociales de notre pays. Chacun a ses aspirations et ses projets. Les territoires ruraux doivent définir leur devenir dans le dialogue et la compréhension entre agriculteurs et autres ruraux ; il s’agit d’habiter ces territoires ensemble, chacun y trouvant sa place. Au niveau de toute la société, la qualité de l’environnement et celle de l’alimentation de même que le défi énergétique sont des enjeux importants pour tous et les agriculteurs sont au cœur de ces enjeux. Là aussi il s’agit de construire ensemble. Les polémiques idéologiques, les exclusions et les positions rigides ne construiront rien. Il faut avancer ensemble dans l’écoute, l’accueil de ce que porte l’autre.

Dans toutes ces évolutions que nous connaissons, une attention particulière doit être portée aux plus fragiles, ceux qui risquent de rester au bord de la route. Une solidarité doit se manifester pour leur permettre de garder leur dignité à eux aussi.

Des technologies de pointe au service de la communauté humaine

Il nous faut aussi veiller à ce que la puissance des technologies de pointe (biologiques, informatiques) ne vise pas que le profit et la suprématie mais reste bien au service de l’être humain et de la communauté humaine. Comme le rappelle régulièrement le pape François, ce sont les valeurs fondamentales de respect de la dignité humaine et de recherche de la communion entre tous qui doivent guider le progrès technique.

Tous ces efforts pour sortir des impasses et avancer vers une société plus juste et plus fraternelle en harmonie avec la nature peuvent nous apparaitre difficiles et même vains. Saint Paul nous dit que c’est comme un enfantement, il va vers la vie.

Notre foi est source d’espérance

Et au moment où nous entrons dans le temps de l’Avent, il faut nous rappeler que nous ne fêtons pas seulement un évènement du passé, la naissance du Christ. Sa naissance n’est commémorée que pour nous rappeler que le Christ reviendra pour accomplir ce qu’il a commencé. Cette foi est la source de l’espérance qui anime les chrétiens et fait qu’ils ne baissent jamais les bras. Nous ne pouvons pas abandonner notre responsabilité. Dans le soleil ou le brouillard, il faut construire une société où l’homme, responsable de la Création, construit jour après jour par son activité un monde harmonieux, un monde de progrès humain vrai. Les Béatitudes nous rappellent les dispositions profondes qui doivent nous animer pour aller dans ce sens : désintéressement qui traduit la pauvreté de cœur, souci de la justice, travail pour la réconciliation et pour la paix, dévouement sincère pour le bien de l’ensemble.